CHRONIQUES, LETTRE D'INFO MENSUELLE

ET LE SILENCE FUT !

| DÉCEMBRE 2020 |

Que de silence depuis septembre, depuis mon dernier courrier. Cette « folle envie de silence » de l’été dernier aura eu raison de toutes les vagues et de toutes les tempêtes. Laissant gronder l’orage et  s’agiter la houle, laissant le mental dans sa course folle, le Coeur s’accrocher au bastingage, au souffle… Respirer, sentir, écouter, accueillir, puis, agir, parler, hurler, parfois, laisser les larmes couler, et la paix s’installer… Tel fut mon automne. Entre amour et douleur, entre colères et joies. Entre pertes et reconstruction.

Oui, ces derniers mois furent intenses, pour beaucoup d’entre nous. Et pour moi en tout cas ; intenses en rencontres de coeur, en urgence de vérité intérieure, de tri, de délestage… et d’échanges d’une rare beauté.

A me relire, tout cela semble fort dramatique. En réalité, il s’agit « juste » de « la vie », n’est-ce pas ? Un processus de mort et de renaissance constamment présent dans le Vivant.

Aujourd’hui semble se présenter à moi, à nous (?), un espace où seule l’authenticité et le lien de coeur permet de tenir le coup. Un espace qui nous veut, qui nous exige adulte, responsable, conscient, intègre. Debout et humble. Vulnérable et puissant. Un espace où prendre soin de nos émotions, de nos blessures, de notre monde intérieur est plus vital que jamais.

Alors que la vie professionnelle et parfois sociale semble avoir basculé sur zoom, alors que les liens avec nos êtres chers éloignés géographiquement sont mis à si rude épreuve, comment se relier par zoom si ce n’est par le coeur ? Comment trouver cette distance supportable, si ce n’est en ouvrant notre coeur toujours plus et se laisser toucher, se dé-voiler à défaut de pouvoir se dé-masquer.

Comment trouver tout cela supportable si ce n’est en faisant le pari de la vérité, de l’authenticité, de l’essentiel ?

Prendre le risque de tout perdre, alors que tant a déjà été perdu en chemin cette année. Prendre le risque de faire encore plus le vide, pour laisser encore plus de place au nouveau qui s’annonce, forcément, inévitablement. Laisser sa place à la peur et à la douleur, respectueusement, pour les apprivoiser enfin, après une vie à tenter de les fuir ou de les dominer. Faire le pari de l’honnêteté intime, de cette vérité intérieure qui fait si peur… Embrasser ce qui est, sans réserve, sans retenue, sans masque. Faire le pari de la vérité, dans sa douce puissance, puisque de toute façon, tout s’effondre… Bref aujourd’hui, plus que jamais, nous sommes contraints à nous « faire la vérité », à défaut de nous faire des bisous; contraints à nous « faire l’amour » en permanence. A faire table rase d’un passé qui n’est plus, nous taire et nous aimer. Nous taire et nous tendre la main, l’oreille, le coeur. Ecouter par delà les mots, regarder par delà les silences. Nous relier, par delà les distances.

Cet automne, alors que tant de douleurs et de peurs déferlaient de toutes parts, j’ai vu naître en beaucoup d’êtres dans mon entourage, privé ou professionnel, j’ai vu naître le courage de se remettre debout, quitter le monde de l’homme-enfant ou de la femme-enfant pour prendre enfin sa place d’adulte, relié mais autonome, craintif mais courageux.

Oui, cette période nous réclame courage autant qu’écoute, fine et délicate. Danser sur des braises demande une qualité de présence et une vivacité de chaque instant. Pour certains, c’est une véritable apprentissage ; pour d’autres, plus habitués aux secousses et tremblements de terre de la vie, c’est juste une répétition générale, un filage pour tester la solidité de la structure mise en place après tant de répétitions décousues, une mise à l’épreuve, une sorte de crash-test pour tester la résistance, la solidité de  notre véhicule intérieur. Mais pour chacun, novice ou pas en matière de traversée de tempête, il nous faut inévitablement apprendre la patience, la douceur et la tendresse, envers soi notamment, envers nos fatigues, nos peurs, nos faiblesses; pour mieux reconnecter, à notre clarté et nos forces insoupçonnées, à cette capacité d’embrasser ce qui est, et de rester debout, aimant et le coeur vaillant.

Certains voyages nous « brisent », mais la plupart nous transforment, tout simplement. De cette transformation naissent, émergent, ces parties de nous que le confort et la routine ne sauront jamais nous révéler, ces parties de nous qui nous ramènent à cet équilibre intérieur perdu, à cet espace intime où peut à nouveau régner en maître notre « intégralité », notre « intégrité ».

J’aime à me rappeler cette phrase qui me poursuit, comme un mantra, depuis près de 20 ans, depuis la veille d’un départ pour un voyage qui se révéla être le plus transformateur de ma vie : « Tu ne perdras que ce que tu dois perdre. Ne meurt que ce qui doit mourir »… Au retour de ce voyage, j’avais en effet perdu un certain nombre de choses, mais au final, j’avais vécu la plus belle des réalisations : « Seules meurent nos illusions ».

Le réveil est parfois brutal, les douleurs de croissance sont parfois difficiles à accepter, mais au final, une fois que le bateau de la transformation est lancé, que ce soit suite à une maladie, une séparation, un deuil ou une perte quelconque, une fois que le processus est lancé, il n’y a plus moyen de freiner l’avancée du navire. En chemin se révèlent nos forces, nos faiblesses, nos amis, nos ennemis, nos peurs et nos loyautés, nos ombres et nos lumières. Une chose est certaine : quand le feu de l’authenticité s’embrase, impossible de continuer à se mentir. Et c’est là que la vraie vie commence…

L’an dernier, à peu près à cette époque, il m’a été donné de faire la connaissance d’un cacique d’une tribu d’Amérique latine. Je ne savais pas trop ce que j’allais chercher dans cette rencontre. Mais une sorte d’évidence me poussait vers lui. Après quelques minutes de notre première rencontre, il me demande de lui raconter ce qui m’avait marqué, ou plutôt traumatisé, entre l’âge de 9 et 14 ans. Et c’est là que je démarre une longue énumération…. il m’interrompt… « Non, juste entre 9 et 14 ans »….. et moi d’y aller d’un simple « Oui, oui, tout ça c’était bien entre 9 et 14 ans » et de reprendre mon récit…

Un jour je parlerai de tout ça, et des années qui ont suivi. Mais quand je repense à ces jeunes années, où la vie aurait pu être plus « douce », à tant de niveaux, je me dis que j’ai une chance unique d’avoir eu un terrain d’entraînement pareil, et surtout d’avoir eu les ressources intérieures, si jeune, pour traverser tout ça, grandir, me renforcer, accepter les mains tendues, refuser les diagnostiques et les pronostics fatalistes, écouter les appels intérieurs qui me poussaient à chercher les solutions et à sortir de la douleur et de la souffrance. Toujours la tête haute et le coeur aimant.

Une de mes enseignantes de français italophile, qui m’avait beaucoup marquée et qui se reconnaîtra en lisant ses lignes, nous avait parlé un jour en classe de cet auteur américain, Leo Buscaglia, et d’un des ses premiers livres « Vivere, amare e capirsi ». Je l’ai encore, qui me suit depuis plus de 30 ans… Il aura fortement marqué ma manière d’être au monde, en relation, dans la transmission, dans l’enseignement. Par tant de petits détails qu’il décrit. Mais la phrase qui raisonne en moi encore si fort aujourd’hui c’est « Vivere amando è la più grande sfida della vita ». Vivre en aimant est le plus grand défi de la vie. Et quel défi !!!

Aujourd’hui, les mains tendues sont toujours là, la magie des rencontres est toujours d’actualité et la gratitude est toujours immense. Autant que l’admiration, pour tous ces êtres qui affrontent les tempêtes avec courage et humilité, qui prennent soin de leur embarcation et qui apprennent à naviguer ! Au péril parfois de leur vie. Des exemples pour moi ! Tout autant que ces êtres qui, au beau milieu de leur tempête, viennent me demander de l’aide et dont le chemin de transformation et de guérison inspire le mien en écho et transforme mon propre chemin ! A tous ces êtres courageux, merci pour les cadeaux !

Aujourd’hui, je n’arrive à me plaindre de rien, ou de pas grand chose, à part le manque d’amour, peut-être, dans ce monde où il est si souvent, si facilement, supplanté par la peur et l’aveuglement, et où la violence, gratuite et insidieuse, est presque devenu « normale ».

Aujourd’hui, je n’arrive pas à avoir vraiment peur de ce cataclysme qui se prépare. Le pire n’est jamais certain, certes, mais une chose est sûre, une transformation de fond est en cours, et résister à la douleur, résister au changement, c’est se condamner à souffrir.

Aujourd’hui, alors que nous nous approchons du moment le plus sombre de l’année, de cette année « fécale » comme diraient certains ;), je  nous souhaite de trouver le moyen de retrouver le sens profond de ces mains tendues, de faire de la place, de gré ou de force, dans nos agendas surcharges, dans nos vies trépidantes, pour le vide, le rien, le silence ; pour cet espace qui crée et permet les rencontres, le nouveau, le renouveau. Cultiver cet espace épuré par tant de petites morts intérieures et y regarder pousser des senteurs nouvelles sur un terrain assaini et régénéré par les cendres et y regarder éclore des essences plus proches de notre terre intérieure d’origine.

Voilà ce que je nous souhaite pour cette fin d’année… et pour la nouvelle, et les suivantes. Laisser éclore les fleurs nouvelles et laisser se diffuser leur parfum loin à la ronde.

Je ne sais pas quand je vous réécrirai de manière si personnelle. J’aimerais beaucoup retrouver le rythme mensuel de ce début d’année. Mais quel que soit le rythme de mes écrits, je serai ravie de vous lire et de vous entendre, garder un lien, rester proches par les mots et par le coeur.

Et en attendant, je vais continuer à laisser la mue se faire, continuer à laisser mon travail s’approfondir et les rencontres me transformer et transformer ce qui doit l’être.

Au rang des transformations « extérieures » en cours,

  • Mon site a entamé une mue qui devrait rendre la présentation de mon travail et de mes activités un brin plus claire. Il était temps.
  • La traduction du contenu en italien et en anglais est également en cours, à la demande presque générale. Mais c’est là un gros morceau, que je me fais quotidiennement la promesse de traiter sans stress ni pression 🙂
  • Des nouvelles collaborations sont en train de voir le jour. Pour ma plus grande joie et aussi pour ma plus grande déstabilisation, après tant d’années à me débrouiller presque seule pour tout ! 🙂 Vous en saurez plus sans doute dans les semaines à venir. Affaires à suivre …

En parlant de rencontres, juste avant les fermetures de novembre, nous avons eu tout juste le temps d’accueillir dix personnes à la dernière conférence du cycle des Bonnes ondes de l’Antenne à Sottens.  « La vie, la mort la joie » fut une très belle soirée, et, si j’en crois les retours, il y a de fortes chances pour qu’on remette le sujet sur la table l’an prochain.

D’ici là, oui, profitons de cette fin de cycle pour laisser mourir ce qui doit mourir, laisser pleurer ce qui doit être pleuré et faire la place pour le nouveau, le renouveau.

Cette année fut riche en chamboulements de toutes sortes. Je nous souhaite qu’elle se termine dans un apaisement et un espace propice à la digestion, à l’intégration et à la transmutation.

A la joie de vous retrouver, en ligne, en attendant mieux…

A très bientôt !

Prenons soin !

Avec mes lumineuses salutations,

Anna-Maria


Avec les bons voeux d’André Sauvé…

C’EST ÇA QU’EST LÀ !


Lire la newsletter complète


Vous pourriez également aimer...