L'ARBRE À PALABRES, Sagesse & beauté

LIBÉRER LES CONFLITS


 » Les techniques qui libèrent d’un conflit présupposent un autre conflit, parce que le conflit, c’est moi. (…)

Attraction, répulsion, je veux, je ne veux pas, j’ai peur, j’ai besoin, etc. Vouloir se débarrasser des conflits est un manque de vision. On ne peut rien supprimer. Le conflit que j’ai, j’en ai besoin.
Pourquoi le fuir et en créer un autre alors que j’en ai déjà un ? C’est très bien comme ça. Il faut être fainéant. Je garde mes conflits, pas la peine d’en inventer de nouveaux. Je les écoute : dans cet espace, quelque chose d’antérieur au conflit peut se révéler.

Krishna Menon avait comparé les yogis, qui souhaitent se défaire des conflits, à des gens qui veulent couvrir le monde de cuir. Il disait : « Moi, je prends une paire de chaussures. »

Ce n’est pas la peine de tout corriger. Si on rétablit l’équilibre d’un plateau, tous les objets posés sur celui‐ci reviennent ensemble à l’équilibre. Vouloir se libérer d’un conflit, c’est vouloir rééquilibrer chaque objet du plateau séparément, l’un après l’autre. La voie directe consiste à rééquilibrer le plateau. Donc, on ne s’occupe pas des rectifications locales. S’il le faut, on peut créer une accalmie temporaire, mais toujours avec cette vision globale.

Dieu n’a pas fait d’erreur que je doive réparer. J’ai besoin de tous les conflits. Je revendique les cicatrices que je porte. Personne n’a le droit de me les enlever. Elles partiront quand elles devront partir… Ce respect permet une profonde transformation.

Vouloir rectifier le problème avec mes parents, ma femme, mon corps, mon passé, etc., c’est sans fin !

Dans les voies progressives, on peut enlever un conflit. C’est facile, cela peut momentanément créer une énorme ouverture chez la personne. On s’approprie des qualités, on se libère de ce qui est gênant : c’est une forme d’ajournement.

La voie directe, sans transformation, paraît plus longue. L’entourage peut se dire, vingt ans après, que la personne a très peu changé, mais ce n’est qu’une apparence. Au moment de la mort, on constate le vrai changement. Si la perspective de vivre cet espace en nous existe, à ce moment‐là, cette intégration aura lieu. Une rectification se fait – et je n’ai pas à me préoccuper de savoir si c’est illusoire ou profond.

Ce que je ressens devient l’objet de ma contemplation, ce qui m’est le plus cher ; le conflit que je sens est mon cadeau : je le découvre, je l’écoute.

Je n’ai pas à m’en libérer. M’en libérer, c’est l’écouter.  »

Eric Baret, De l’Abandon, Ed Les Deux Océans


 

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